BUENOS AIRES, Tendances socio-spatiales....

TENDANCES SOCIO-SPATIALES DU NÉOLIBÉRALISME et ALTERNATIVES DE RECOMPOSITION DU TISSU SOCIAL À BUENOS AIRES. Le Cas du Ceibo R.S.U, une coopérative autogérée.

[Irene Fernández Álvarez, perufer2004@yahoo.es] Mémoire 3ème cycle. École d'architecture Paris- La Villette.
Décharger le travail complet

PRESENTATION DU SUJET


La société argentine a subi pendant ces derniers 30 ans, un processus soutenu de d’appauvrissement et de perte progressive de droits sociaux. La mise en place de profondes transformations politiques et socio-économiques ont aussi causé un fort impact sur les pratiques et l’organisation socio urbaines de la ville de Buenos Aires.

Beaucoup d’auteurs situent dans la dernière dictature militaire, le point d’inflexion qui aurait permis le basculement vers la situation actuelle. Malgré sa courte durée (1976-83), cette période a signifié, par la brutalité des actions menées et la profondeur des réformes achevées, la base pour « la transformation radicale de la société. »
L’impunité et la brutalité caractéristiques du régime militaire, ont provoqué l’affaiblissement des institutions publiques et des séquelles dans les attitudes de la population. L’usage de l’espace public a été aussi fortement touché par l’action violente et répressive des militaires.

L’arrivée de la démocratie en 1983 a permis une appropriation généralisée de l’espace publique. Pourtant, ces tentatives de participation sociale –par « l’inclusion des exclus »- ont fait partie seulement du « printemps alfonsiniste » qui promettait des transformations politiques, sociales et culturelles jamais concrétisées. [Lacarrieu, 2005] La continuation du modèle économique de la dictature et la non-dérogation des lois et des codes approuvées durant la même période (par exemple, le code d’urbanisme) ont provoqué –malgré la démocratie- la reproduction d’un modèle d’exclusion et de génération de fortes inégalités.

Pendant les années 90, tous les indicateurs socioéconomiques –marge entre les plus riches et les plus pauvres, index de chômage, etc.- montrent clairement une polarisation socio-économique grandissante. Pourtant, ce n’est pas seulement la montée des inégalités qui a provoqué la décomposition effective du tissu social. Dans une société déjà très frappée par les événements récents, le discours officiel dominant des politiciens et des médias sur la crise urbaine et l’insécurité, ainsi que les stigmas portées sur certaines problématiques sociales -comme la pauvreté, les cirujas ou les piqueteros- ont provoqué la « démythification abrupte d’une Buenos Aires construite tout au long d’un siècle sur la base de l’intégration sociale et de la sécurité. » [Lacarrieu, 2005]
Les différents groupes sociaux se séparent progressivement les uns des autres et l’individualisme domine face à une réalité de plus en plus dure pour la plupart de la population argentine.


L’éclatement de la crise sociale en 2001 a marqué un nouveau point d’inflexion dans l’histoire sociale du pays dans la mesure où après plus d’une décennie de passivité sociale, décembre 2001 a signifié la mobilisation massive de l’ensemble de la société. Pendant un moment, on a oublié les différences et une incroyable vague d’énergie et de solidarité a permis la mise en marche de nombreuses initiatives sociales, ainsi que le renforcement des groupes et des projets déjà existants et la cohésion d’une grande quantité de réseaux solidaires d’entraide et de travail collectif. Une nouvelle porte s’est ouverte à la « construction de chemins alternatifs pour la recomposition du tissu social et productif du pays » [Fernández, 2004]

Dans ce contexte, le but de notre travail a été d’abord, d’essayer de comprendre les transformations de la ville de Buenos Aires dans cette période de son historie récente, notamment à partir de l’adoption du modèle néolibéral. Pour cela, nous avons décidé de consacrer la première partie de ce travail à l’étude de l’évolution socio-spatiale de la ville, spécialement à partir de la mise en évidence de l’impact de la polarisation socio-économique sur le tissu social et la planification urbaine. L’étude de la réalité actuelle nous a permis de valoriser l’impact de l’organisation des secteurs populaires face à la mise en place des stratégies ségrégatives qui questionnent leur place dans la ville.

Comme nous allons l’étudier tout au long de cette première partie, l’adoption brutale du modèle néolibéral en Argentine a causé l’appauvrissement et la précarisation d’une large partie de la société. Il est clair que la dynamique du capital privé ne permet que la reproduction dans des conditions dignes d’une petite partie de la population. De son coté, l’État n’a pas été capable de compenser les inégalités générées qui sont pour beaucoup, des traits intrinsèques au système lui-même.

C’est dans ce sens que la multiplication de stratégies alternatives d’autogestion, nées dans l’urgence de la nécessité, s’est dévoilée comme l’un des processus sociaux plus intéressants des dernières années au sein du pays. En Argentine, la résistance au modèle néolibéral n’est pas venue –comme c’est le cas généralement dans les pays du nord- des forces contraculturelles qui critiquent l’aliénation produite par les nouvelles modalités du travail salarié ou de la marchandisation des rapports sociaux. En réalité, l’expérience argentine est née dans les marges, dans les limites, dans l’extrême de la décollectivatisation massive, même si elle compte avec un important passé d’intégration sociale. [Svampa, Pereyra, 2003]
Ainsi, nous consacrerons la deuxième partie de ce travail à l’étude d’une des ces organisations qui proposent des alternatives de reconstruction sociale, non à partir de la théorisation, mais de la pratique et la lutte jour après jour face à une réalité de pauvreté extrême : Le groupe « El Ceibo. »

0 Comments:

Post a Comment

<< Home